Beauquis, père et fils : deux générations qui transforment les fruits en eau-de-vie, grâce à leur alambic ambulant. Ce métier ancestral perdure encore aujourd’hui sur notre territoire Thônes Coeur des Vallées.

Une passion partagée en famille

La famille Beauquis est implantée à Marcellaz-Albanais en tant qu’exploitants agricoles au Gaec de l’alambic (ça ne s’invente pas). Daniel a lancé en 1977 son activité de distillateur ambulant et c’est en 2016 que son fils Adrien l’a rejoint pour sillonner les villages et transformer les fruits en alcool. Chaque année, ils parcourent 6 départements de la région Auvergne-Rhône-Alpes (Haute-Loire, Isère, l’Ain, la Savoie, la Loire).

En Haute-Savoie, l’alambic s’arrête dans plusieurs communes : Le Bouchet-Mont-Charvin, Villy-le-Pelloux, Manigod, La Balme-de-Thuy, Villaz et Thorens, Talloires et Saint-Férreol.

En ce mois de février, l’alambic des bouilleurs ambulants s’est installé au centre du village du Bouchet-Mont-Charvin afin d’accueillir les habitants souhaitant distiller les fruits de saison.

Ce repère traditionnel du milieu de l’hiver est un événement incontournable au village. Autour de Daniel et Adrien, quelques habitués venus assister à la transformation, profitent d’un moment convivial tout en goûtant à la gnôle fraîchement distillée. Raisonnablement, bien sûr !

La distillation

Le travail des bouilleurs de crus commence par la réception des fruits ou des céréales. Ils s’assurent de la qualité de la matière première avant de la transformer en moût, qui est ensuite distillé dans l’alambic. La distillation permet de séparer l’alcool de l’eau, et de produire un liquide titrant entre 40 et 70 degrés. Ce liquide est appelé « brouillis » et sera ensuite rectifié une ou plusieurs fois pour obtenir une eau-de-vie de qualité supérieure.

Le métier de bouilleur de crus est strictement encadré par la loi. Les alambics utilisés doivent être conformes aux normes de sécurité et de qualité, et les bouilleurs doivent être titulaires d’un agrément délivré par les autorités compétentes. Les quantités produites sont également réglementées, afin de lutter contre la production illicite d’alcool.

Une législation qui remonte à Napoléon, indique qu’en France, toute personne propriétaire d’une parcelle ayant la dénomination de verger ou de vigne sur le registre du cadastre peut distiller les produits issus de cette parcelle (f20 litres détaxés par personne). Pour cela, il est nécessaire de contacter le bouilleur de crus en amont pour fixer un rendez-vous.

Un peu d’histoire

Gnôle, casse-gueule, Schnaps, goutte, digeo, tord-boyaux, pousse-au-crime, casse-pattes, brandevin… L’eau-de-vie (« aqua vitae ») s’accompagne depuis longtemps d’un certain nombre d’idées reçues. Au Moyen-Âge, les premiers alchimistes pensaient produire un élixir capable de prolonger la vie. L’eau-de-vie était d’ailleurs vantée par les médecins et les apothicaires comme un remède universel capable de guérir tous les maux. Ce n’est qu’au 15ème siècle que la distillation rentrera dans le domaine des alcools de consommation. L’essor de leur commercialisation n’interviendra qu’au 17ème siècle (cognac, armagnac, whisky, vodka…).

Bien que le métier de bouilleur de crus soit ancien, il reste d’actualité et continue de faire vivre les zones rurales. En effet, la production artisanale d’alcools issus de fruits et de céréales a le vent en poupe, et de plus en plus de consommateurs se tournent vers des produits locaux, authentiques et de qualité.

Les bouilleurs de crus sont donc des acteurs importants de la filière de la production artisanale d’alcools, et leur savoir-faire est précieux pour la valorisation des productions locales. Ils perpétuent également une tradition qui remonte à plusieurs siècles, et qui fait partie intégrante du patrimoine culturel de nos montagnes.